« Trouver un lien » est une pratique fréquente en Chine lors d’une première rencontre. Comment trouve-t-on ce lien ? Assez simple ! On peut avoir recours au yuán fèn, 缘份*.
Le simple lien
He, directeur financier, doit traiter un litige, que suit de près la Chambre de commerce peu accommodante. A son second rendez-vous, un nouvel interlocuteur, Lu se joint à la réunion. Dans la conversation, ils se rendent compte qu’ils sont tous les deux diplômés du même établissement universitaire. Les tracas de He vont vite s’atténuer. Il m’expliquait que « Souvent, lors d’une première rencontre, les Chinois, nous aimons nous trouver un lien, une région, une école, un professeur, un ami, etc…, Ça nous permet de « créer le lien » et de pouvoir avancer ensemble et résoudre un problème plus facilement et avec davantage de confiance ». En effet, j’ai pu voir des situations se décrisper lorsque le lien s’installait. Un client perdit sa colère devant un fournisseur de télévision quand il comprit à l’accent, que tous deux venaient de la même région de la province du Hebei. Un grand patron accepta de passer une commande à une société car son homologue avait eu le même grand professeur à l’Université. Et même quand il n’y a pas de lien, on peut en trouver un avec le yuán fèn.
Yuán fèn 缘份, les deux caractères
En effet, ce mot signifie une affinité prédestinée. Ce concept vient du bouddhisme qui considère que certains êtres sont reliés par le fil du destin. Le premier caractère comprend à la gauche 纟 la soie avec ses fils. Dans ses premières graphies, on voit bien les fils de la soie :
Le second caractère, 份 , veut dire part, portion.
缘份et les relations amoureuses
Il est employé dans les relations sentimentales lorsqu’on pense que deux personnes sont prédestinées à se rencontrer. Ils ont « yuan fen ».
Dans la vie de tous les jours et les affaires
Je l’ai rencontré dans la vie de tous les jours; ce terme semble plus utilisé dans le Sud de la Chine.
Quelques exemples :
Un client chinois, après quelques rencontres et une bonne relation me dit : « Tu te rends compte, nous sommes 1,4 milliard et tu fais ma connaissance. Parmi 65 millions de Français, je fais des affaires avec toi. Nous avons vraiment yuan fen. »
Un jour, Zhongmei, l’épouse de ce client me demande si je peux lui trouver un professeur de français pour son fils. Je fais quelques recherches, une étudiante se présente, mais elle fait faux bond après le premier cours. Je suis désolé ; Zhongmei me répond : « Ce n’est rien, nous n’avions pas de yuanfen avec cette prof. »
Un voisin cantonais, Zhou, qui est en train de lancer sa société, voulait me voir depuis quelques semaines. Je subodorais bien qu’il avait besoin de moi. Le marché en ligne avait explosé ces dernières années et il était en train de développer un concept axé sur les articles ménagers. Ce matin, je suis descendu dans son bureau au 19e étage. Avec un délicieux thé, il m’expliquait son projet de A à Z. Je m’amusais à l’écouter et je me demandais comment il allait me demander son aide. Il m’a fait le coup du… yuan fen. Zhou, avec son petit sourire a abordé le sujet par : « 我们有缘份, nous avons du yuan fen, on peut faire des affaires ensemble. Tu dois certainement connaître un capital risqueur européen intéressé par mes projets. »
Il suffit donc de trouver des liens pour avoir des liens et le yuanfen est d’une grande aide.
*缘分, la seconde partie s’est simplifiée. Elle peut s’écrire sans la partie gauche de l’homme. Les dictionnaires ne sont pas d’accord entre eux sur l’égalité de la signification entre 缘份 et 缘分, mais dans la pratique, les sens semblent identiques.
1er juin 2020